Pierre Merlat, Jean Bousquet, Louis Pape et Annie Bardel, tous rattachés à l’Université des Lettres, peuvent être considérés comme les pionniers de l’archéologie préventive à Rennes. Ils n’ont cependant pas dirigé de grandes fouilles, comme il s’en pratique aujourd’hui régulièrement, mais se sont retrouvés confrontés à la destruction malheureuse de pans entiers de l’histoire urbaine. Témoins des travaux d’aménagements des années 1950, 1960 et 1970, ils ont été les premiers à sauver ce qu’ils pouvaient quand les pelleteuses s’arrêtaient quelques heures. En 1958 et 1968, on ne peut réaliser que quelques photos et récupérer des dizaines de blocs architecturaux antiques retrouvés dans deux tronçons de la première muraille en cours de démantèlement. Entre 1977 et 1979, la construction du collège Echange occasionne une première opération de sauvetage archéologique avec fouille manuelle et relevés en plan. Les interventions des archéologues, tout juste tolérées, restent cependant bénévoles et ne sont nullement prévus en amont des travaux.

C’est à partir de la fin des années 1980 que l’archéologie est véritablement prise en compte dans les procédures d’urbanisme de la ville de Rennes. La reconstruction de plusieurs immeubles implique alors la réalisation de fouilles importantes dans la rue de Saint-Malo et dans la rue de Dinan, mais la multiplication des projets de grande envergure donne l’occasion de réaliser des opérations particulièrement vastes dans le centre-ville. Certains programmes sont publics comme l’aménagement du parking souterrain de la place Hoche, la construction du métro ou l’installation du centre des congrès de la métropole dans l’ancien couvent des Jacobins ; d’autres sont privés à l’instar de la construction d’un immeuble dans l’enceinte de l’ancien hôpital militaire Ambroise Paré ou de l’édification du centre commercial de la Visitation. Tous s’insèrent cependant dans une transformation de la ville de Rennes qui touche ses habitants et ses visiteurs à travers une modification du paysage urbain et une nécessaire prise en compte d’un patrimoine commun. Depuis 30 ans, les pouvoirs publics, qu’ils soient nationaux ou locaux, ont toujours été sensibles à ces considérations en s’assurant que la loi sur la protection des vestiges archéologiques soit appliquée avec intelligence. Dans ce contexte favorable, les agents de l’Inrap impliqués dans l’archéologie rennaise ont largement fait avancer les connaissances sur le passé de la ville. Nul doute que le suivi des recherches par une même équipe a été bénéfique à ce travail en garantissant son efficacité par une bonne maitrise de l’environnement archéologique.
Gaétan Le Cloirec, archéologue à l’Inrap, UMR 6566,
co-commissaire de l’exposition Rennes, les vies d’une ville
Juillet 2019.
