Roz-Landrieux : des statères de billon des Coriosolites de retour sur leur lieu de découverte…

Une cinquantaine de monnaies découvertes en 1907 à Roz-Landrieux (Ille-et-Vilaine) feront le voyage de retour lors d’un prêt à la commune pour les Journées européennes du patrimoine 2019.

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Statères de billon des Coriosolites émis dans la première moitié du 1er siècle av. J.-C., découverts en 1907 dans un vase à Roz-Landrieux  (400 monnaies environ, principalement coriosolites) – Collection musée de Bretagne, Rennes

Les monnaies coriosolites sont connues par un nombre considérable de monnaies dont une bonne partie en trésors dont ceux de Jersey, Trébry (Cotes-d’Armor) ou ici celui de Roz-Landrieux.

Pour de nombreuses séries de monnaies armoricaines de billon, environ sept à neuf classes typologiques ont été définies par les numismates, occasionnant des modèles sensiblement différents. Elles sont néanmoins pour la grande majorité caractérisées par un modèle abstrait associant sur l’avers une tête humaine à la chevelure en trois rouleaux, tournée vers la droite, au cheval androcéphale bridé au revers, accompagné de la représentation stylisée d’un aurige (cavalier), et d’autres éléments pouvant varier selon les types : lyre ou sanglier, entre les pattes du cheval.

Le musée de Bretagne possède une des plus riches collections de monnaies celtiques de France. Celles de l’Armorique y occupent une place de premier plan, avec de prestigieux trésors qui apportent un témoignage inestimable sur l’histoire de toute cette région à la période gauloise.

Quelques monnaies issues de la découverte de Roz-Landrieux sont entrées par don dans les collections du musée dès 1929, mais c’est surtout l’achat en 1952 d’une partie de la collection de Ludovic Mocudé, qui enrichit significativement les fonds.

Mocudé était un magistrat, membre de la Société Archéologique d’Ille-et-Vilaine (de 1907 à 1932) et grand collectionneur. Grâce à cette transaction, favorisée par Jean-Baptiste Colbert de Beaulieu -chercheur connu à cette époque pour ses travaux sur le monnayage des Parisii et des cités armoricaines et bientôt l’un des numismates, auteur d’un traité fondateur de numismatique celtique, qui renouvellera profondément ce champs d’investigation -, ce sont plus de 100 monnaies celtiques qui entrent dans les collections. Les armoricaines en représentent la presque totalité.

Les trésors monétaires de la période gauloise permettent par leur étude de déterminer qu’un système monétaire armoricain semble s’être mis en place dans le courant du 1er siècle av. J.-C., basé sur l’adoption d’un même référent iconographique au revers – le cheval androcéphale -, un poids évoluant entre 6 et 6,8g, un titre d’argent équivalent. La circulation est fréquemment limitée au territoire de la cité gauloise, attestant d’une économie monétaire relativement fermée dans laquelle les monnaies restent dans l’aire contrôlée par le pouvoir émetteur.

Durant la guerre des Gaules contre César au milieu du 1er siècle av. J.-C., on note néanmoins une augmentation considérable des monnaies en circulation, indiquant très certainement qu’une partie de ces émissions correspond aux besoins de l’armée de la coalisation armoricaine (paiement des mercenaires, vivres, armement…) : le rôle dans le financement de la guerre du monnayage frappé dans les ateliers dits coriosolites a notamment dû jouer un rôle particulier.

La carte des trésors coriosolites, de loin les plus nombreux, montre qu’ils semblent se diffuser à partir d’un épicentre situé dans la région d’Avranches, c’est-à-dire hors de leur territoire mais dans la région où César situe l’anéantissement des Armoricains coalisés face au légat Labiénus. Le volume considérable de ces trésors se retrouve dans les lieux de dispersion de l’armée avant la reddition, une partie vers le Nord de la « Normandie », une partie vers le territoire coriosolite et la plus grande masse vers Jersey (plus de 20 000 pièces). Les numismates avancent l’hypothèse selon laquelle les Coriosolites auraient été chargés de la frappe des émissions de guerre nécessaires à la coalition armoricaine décrite par César, placée sous les ordres de Viridorix. Les monnaies seraient dans ce cas des émissions de ligue et non des monnaies  de cités.

Aujourd’hui ces trésors monétaires, souvent présents de manière ancienne dans les collections muséales, sont toujours utilisés par les chercheurs comme sources de référence et matière pour de nouvelles méthodes d’investigation et de nouvelles théories (d’actuels projets de numérisation en 3D par exemple permettent de renouveler l’approche iconographique et l’étude de la frappe).

Manon Six.

Septembre 2019.

Billon : alliage à base de cuivre et d’argent

Statère : unité du système monétaire grec et macédonien valant deux drachmes. A l’origine les statères étaient d’or et pesaient 8,30g, et furent le prototype d’une grande partie des monnaies gauloises. On continue ensuite à appeler « statère de billon » les monnaies armoricaines dérivant de ce prototype même si leur poids est différent et leur composition est un alliage

Coriosolites : peuple celte de la Confédération armoricaine. Leur territoire s’étendait entre l’actuel département des Côtes-d’Armor et celui d’Ille-et-Vilaine et leur capitale, à laquelle ils donnèrent leur nom, était Corseul.

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