Les frères Isidore (1845-1912) et Vincent (1848-1909) Odorico naissent à Sequals au milieu du 19e siècle. Fuyant la misère qui règne en Italie du Nord, ils rejoignent leur compatriote Gian Domenico Facchina à Paris et travaillent sur le chantier de l’Opéra-Garnier.
Après un passage à Tours dans l’entreprise de ciment de Joachim Novello, les deux frères fondent leur propre affaire à Rennes en 1882. Artisans hautement qualifiés, ils se spécialisent dans la pose de « mosaïques vénitienne et romaine, mosaïque de marbre pour dallage, mosaïques en émaux et or ». Le marché de la mosaïque est alors pratiquement inexistant dans l’Ouest.

Ils proposent à leur clientèle toutes sortes de motifs à la mode du moment – façon antique, Renaissance puis Art nouveau – en s’inspirant des catalogues diffusés par les fabricants de matériaux de pavement.
A cette époque, les ouvriers de l’entreprise Odorico sont en très grande majorité Italiens, originaires du Frioul. Ils peuvent être saisonniers, comme Alexis Mander, que l’on voit sur l’image ci-dessous. Il vient travailler à Rennes en hiver et retourne dans son village frioulan à la belle saison.

A ce jour, quarante programmes de leur production sont répertoriés. Ce sont surtout des sols d’entrées, des plaques de maisons, des sols de boutiques, des détails d’architecture et plus rarement, des ornements d’églises.
Plaques de maison et paillassons
Plaques de maison et paillassons se situent à l’extérieur de l’édifice, ils en marquent le seuil et permettent au propriétaire de personnaliser son bien dès l’entrée. Les paillassons, généralement réalisés en tesselles de marbre, sont composés d’un motif central cerné de bordures polychromes. L’ornement doit être le plus lisible possible, les contrastes des différentes zones sont donc soutenus.

Tapis
L’ornementation peut se poursuivre à l’intérieur, sur les sols, sous la forme de tapis. En fonction des budgets, on retiendra le marbre ou le granito – déchets de marbre amalgamés à un mortier – avec des bordures monochromes ou des frises d’abondants feuillages. Leurs formes empruntent aux modèles fournis par les fabricants comme la Société des marbres d’Avesnières ou Simons & Cie à Cateau…

La mosaïque au service de l’architecture
Au tournant du 20e siècle, la production de l’entreprise évolue. Les demandes d’une riche clientèle ouvrent de nouvelles perspectives. La collaboration avec les architectes permet une réflexion plus complexe.

Les décors religieux
Les réalisations religieuses sont l’occasion de travaux plus élaborés. Les ornements, le plus souvent conçus par les architectes eux-mêmes comme Arthur Régnault ou les frères Jules et Henri Mellet, recouvrent autel et ciborium (baldaquin surplombant l’autel). Ils se déclinent en simples motifs répétitifs, mais aussi en véritables « tableaux ». Pour ceux-ci, les frères Odorico collaborent avec un certain Player qui connaît parfaitement les ressources de la mosaïque d’ornement aussi bien que les figures, dans un style néo-gothique convenu.

Le fondateur de l’entreprise, Isidore père, meurt en 1912. Après la Grande guerre lui succèdent ses deux fils, âgés respectivement de 39 et 25 ans.
Découvrez les productions Odorico père conservées au musée de Bretagne ici.
Texte extrait de Odorico, 100 ans de mosaïques, éditions Apogée, Rennes, 2009.