Occupé dès les 2e-1er siècles avant notre ère, le territoire actuel de Rennes est habité par les Riedones, peuple gaulois qui laisse son nom à la ville. Si leur capitale Condate évoque le confluent de l’Ille et de la Vilaine, aucune trace formelle n’atteste aujourd’hui l’existence d’une ville gauloise constituée (oppidum) sur laquelle aurait été fondée la ville romaine. La conquête de la Gaule par Jules César et la mise en place de son administration par l’empereur Auguste à partir de 16-10 av. J.C., marquent une étape décisive dans l’organisation politique et urbaine de la Gaule. Le chef-lieu de la Cité des Riedones est fondé à la fin du 1er siècle av. J.C., au nord de la Vilaine et à l’Est de l’Ille, sur une emprise d’environ 90 hectares. Les premiers travaux d’aménagement, certainement réalisés par les militaires, permettent la mise en place des composantes urbaines : la voirie et les différents bâtiments à usage public (notamment religieux) et privés (habitat), avec un développement indispensable des activités artisanales.

La fin du 2e siècle après J.-C. est marquée par une période troublée d’incendies, de destructions et d’abandons, encore mal connue, mais qui va se traduire dans la ville par une nouvelle dynamique d’aménagement, à travers la monumentalisation de l’architecture et la densification du tissu urbain, et par le développement de grandes propriétés terriennes sur le territoire. Sous la menace des envahisseurs, une nouvelle période de crise à la fin du 3e siècle génère un bouleversement institutionnel, social et économique qui conduit à une reconfiguration de la ville : certains espaces publics et voies de circulation sont abandonnés, des quartiers déclinent et son démantelés pour laisser place à un castrum, qui outre un rôle défensif, contribue à marquer l’identité et le prestige de la ville qui se réduit à environ 9 hectares.

Le passage de la ville antique à la ville médiévale reste difficile à cerner, face à des traces archéologiques et des sources historiques ténues. Avec l’apparition du christianisme, ce sont les institutions religieuses qui structurent l’occupation, en parallèle à la présence du pouvoir comtal dès les 9e –10e siècles. Au 6e siècle, l’évêque et le quartier cathédral sont implantés dans la Cité, délimitée par l’enceinte antique, tandis que sanctuaires et pôles religieux se développent hors les murs entraînant la création des bourgs et l’étalement de l’occupation.
À partir du 13e siècle, la ville est mieux connue et un nouvel essor peut être appréhendé, encouragé par le duc de Bretagne, porté par une nouvelle administration municipale et révélé par la prospérité marchande et artisanale. Le chantier des deux nouvelles enceintes, construites entre 1428 et 1476, est rendu nécessaire par le développement démographique et urbain, étendant l’emprise de la ville à plus de 60 hectares et la divisant en trois espaces distincts : l’ancienne Cité toujours marquée par les pouvoirs religieux, politique, économique ; la Ville neuve où s’installent bourgeois et commerçants ; la Ville nouvelle avec les faubourgs artisans.

En 1561, le roi de France décide d’installer le Parlement de Bretagne à Rennes, nouvelle capitale administrative et judiciaire, ce qui entraîne l’implantation d’une élite de magistrats, nobles et bourgeois, contribuant au développement de quartiers résidentiels et bâtiments architecturaux répondant aux nouveaux besoins. La fonction militaire de la ville s’efface et les fortifications sont en partie démantelées, laissant de nouvelles parcelles libres et contribuant à l’étalement hors les murs. Tout au long du 17e siècle, en lien avec la réforme catholique, les communautés religieuses multiplient les projets d’installation et d’extension de leurs domaines. En décembre 1720, l’incendie qui s’abat sur la ville offre l’opportunité de concevoir un plan d’urbanisme précurseur, confié à l’ingénieur Robelin puis à l’architecte Gabriel, principalement autour de la place du Parlement et la place Neuve (actuelle place de la mairie), effaçant une partie du parcellaire médiéval et accentuant la disparité entre ville haute et ville basse, de part et d’autre de la Vilaine.

Après la Révolution française et la dissolution du Parlement de Bretagne, Rennes décline, devenant le simple chef-lieu du nouveau département de l’Ille-et-Vilaine. De nombreux bâtiments religieux confisqués comme biens nationaux sont réattribués à l’administration militaire, couvrant Rennes de garnisons. La ville assoupie se réveille progressivement au cours du 19e siècle. Maires, architectes et entrepreneurs œuvrent pour sa modernisation : canalisation de la Vilaine et aménagement des quais, création de boulevards et de bâtiments publics, arrivée du chemin de fer. Dans la continuité du démantèlement des remparts, les octrois marquent les nouvelles limites de l’espace urbain.

Bien qu’une nouvelle dynamique d’aménagement puisse être constatée dans les années 1920, c’est la période d’après-guerre, avec l’action du maire Henri Fréville, qui crée un véritable tournant. Le besoin de logement face à la Reconstruction donne lieu à des programmes de rénovation du centre (Colombier, Bourg-l’Évêque) et d’expansion vers la périphérie avec les premiers grands ensembles des ZUP rennaises, en lien avec un renouveau architectural (Les Horizons par Maillols, le centre de télécommunications par Arretche).

Après les Trente Glorieuses et pendant le mandat d’Edmond Hervé, l’expansion ralentit et la ville se contient dans les limites de la rocade et de la fameuse ceinture verte rennaise, au bénéfice du développement du cadre de vie (requalification du centre ancien, rénovation, sensibilisation patrimoniale). Rennes change d’échelle, avec la naissance dès 1970 du district, devenant communauté d’agglomération en 2000 et métropole en 2015. La ville archipel apparaît, signe d’une stratégie urbaine et d’un développement désormais partagés par l’ensemble des communes du territoire.
Anastasia Delécolle et Manon Six.
Texte extrait de Rennes, les vies d’une ville, Sous la direction de Manon Six, éditions PUR, Rennes, 2018.