De Pierre Soulages à Salman Rushdie, de François Hollande à Vladimir Poutine, artistes, hommes politiques, acteurs ou intellectuels ont tous posé face à l’objectif de Stéphane Lavoué. Aussi à l’aise dans l’art du portrait que dans la photographie de reportage et de documentaire, cet habitué des pages de Libération a mûri progressivement son parcours photographique.
Né à Mulhouse en 1976, il grandit entre l’Allemagne et l’Afrique au gré des affectations d’un père militaire. Diplômé de l’École supérieure du bois à Nantes en 1998, il part vivre deux ans en Amazonie brésilienne, chargé des achats de bois pour un groupe industriel français. Invité le week-end par des salariés de son usine brésilienne, il découvre des tirages de Sebastião Salgado accrochés aux murs de la favela. Il s’agit du reportage sur les ouvriers des mines d’or de la Serra Pelada. Images iconiques, choc, qui le conduisent à révéler sa vocation pour la photographie. De retour en France en 2001, il s’installe à Paris et abandonne le bois pour la photographie, avec une année de formation au centre Iris. Il intègre l’agence Myop en 2006, puis rejoint en 2010 le groupe de portraitistes Pasco.
Pendant plus de dix ans, Stéphane Lavoué travaille pour la presse, d’abord à Libération comme reporter, puis il se spécialise comme portraitiste pour des journaux français (Le Monde, Le Figaro, l’Équipe…) ou étrangers (New York Times, Times). Son projet de conte photographique The North East Kingdom commence en 2013 : travail au long cours réalisé dans une partie du Vermont, à la lisière de la frontière du Canada et des États-Unis, une contrée autoproclamée « royaume » par ses habitants, il sillonne les routes, «de ferme en ferme, à la recherche du roi». Il collecte des images mystérieuses et inquiétantes où l’on décèle un univers à la David Lynch.
Après son installation en famille en Finistère sud, il poursuit son exploration de son territoire proche, le pays bigouden, mêlant travail de portrait, paysage, natures mortes. C’est ainsi qu’il crée la série l’Equipage en 2011, la série A terre en 2016 et Une jeunesse bigoudène en 2017, fruit de la commande du Centre national des arts plastiques (appel à projet Jeunes générations). En 2015, il dresse un portrait de la production alimentaire en Bretagne avec la série Breizh food trip, commande du conseil départemental du Morbihan exposée au festival photographique de La Gacilly.

Il collabore aussi avec le centre des arts de Douarnenez et le port-musée lors d’une résidence de création en 2019 sur le thème du travail. En 2019-2020, accompagné par le Musée de Bretagne, il mène un nouveau projet de récit photographique sur le territoire des Monts d’Arrée, questionnant le légendaire breton, intitulé Les Enchanteurs.

Stéphane Lavoué a remporté le Prix Niepce Gens d’images en 2018.
Le projet d’acquisition du musée s’inscrit dans la continuité des projets photographiques menés depuis quelques années, avec un souci d’accompagner la création tout comme de permettre la valorisation de la photographie. Ainsi, l’exposition Western, visible aux Champs Libres dès la réouverture de l’équipement le 25 mai 2020, est accompagnée d’un accrochage dans le parcours permanent du musée : plus de 120 images, issues des différentes séries pour plonger dans une écriture photographique singulière.

35 images sont aujourd’hui entrées dans les collections du musée : les séries choisies font toutes écho à des thèmes explorés par le musée, présents dans d’autres pans de la collection ou chez d’autres photographes. Il en va ainsi du thème du travail, déjà très présent chez Guy Le Querrec ou Dominique Delpoux. Le thème de l’alimentation prend lui aussi une nouvelle dimension avec une sélection de neuf portraits de Stéphane Lavoué mettant en lumière des producteurs engagés, questionnant le modèle alimentaire breton. Dix-huit photographies de la série Les Enchanteurs, inédite, rejoignent également les collections.
Céline Chanas.
Mai 2021.
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