Histoire d’un studio photographique rennais en trois dons…

En 1997, Claude Cazée, photographe et repreneur du studio Jamet installé à Rennes 6 rue de Nemours, fait don au Musée de Bretagne d’une partie des négatifs de son prédécesseur.

Monsieur Jan Jamet, est spécialiste du portrait et renommé comme tel sur la ville de Rennes. Après une formation de portraitiste-retoucheur au studio Harcourt à Paris, Jan Jamet s’installe  à Rennes en 1954 et y demeure jusqu’au début des années 1980, c’est un excellent portraitiste très en vogue parmi la clientèle de la bourgeoisie rennaise. 90% de son activité concerne le portrait, mariages, communions, portraits d’identité, portraits d’artistes… mais il effectue également des reportages auprès de commerçants et industriels rennais ou des environs.

Portrait de mariée, studio Jamet, Rennes, vers 1960 – CC BY NC ND – Collection Musée de Bretagne, Rennes

Claude Cazée est salarié du studio Jamet pendant une dizaine d’années, avant d’acheter le fonds de Monsieur Jamet en 1981. Dès la reprise du studio, alors nommé Central studio, Claude Cazée essaie de diversifier les activités et la clientèle, il embauche un apprenti, puis un premier salarié et à la fin de son activité (2005) le studio compte entre 9 et 10 employés.

Dans les années 1980, l’activité principale du studio demeurait le portrait, le développement des travaux amateurs occupait environ 30% et la vente de matériel 10 à 15%. Au milieu des années 2000, lors de sa cessation d’activité, les proportions avaient été inversées : le portrait déclinait même s’il occupait encore 20% de l’activité, les travaux de laboratoire étaient devenus l’élément moteur et la vente de matériel photographie prenait également une grande place (40%).

En 1983, Central studio devient le premier atelier de centre-ville équipé d’un laboratoire de développement couleur : ce fut un investissement financier conséquent, l’équipement comprenait une développeuse, une tireuse et une développeuse de films. Tout ce matériel exigeait également l’emploi d’un laborantin spécialisé dans le traitement de la couleur. Ce laboratoire couleur, associé au laboratoire noir & blanc déjà existant, vont faire de Central studio l’un des plus performants studios photographiques rennais.

En dehors de l’activité traditionnelle que constitue le portrait (identité, communiants, mariages, bébés, portraits….), le studio a réalisé de nombreux reportages liés à la vie économique, politique et sociale de Rennes et de sa région.

Salle de formation, cliché Claude Cazée – Tous droits réservés – Collection Musée de Bretagne, Rennes

Cette particularité confère un intérêt considérable aux clichés du Central Studio qui font l’objet d’un nouveau don en 2014. Tous les négatifs sont légendés et datés, les devis figurent quasi-systématiquement avec les négatifs. La documentation réunie et les témoignages des deux principaux protagonistes permettent de bien documenter cette nouvelle collection. Au-delà des images elles-mêmes, c’est aussi le métier de photographe qui se trouve renseigné, profession dont l’évolution n’a cessé et qui a encore été bouleversée il y a une dizaine d’années avec l’usage de la photographie numérique.

En 2021, Monsieur Cazée réalise un troisième don, celui d’une toile peinte utilisée par Jan Jamet et qu’il avait conservé jusqu’alors.

Fond photographique provenant du studio Jamet – CC0 – Cliché A. Amet, collection Musée de Bretagne, Rennes

Les toiles décoratives servant de fond au photographe sont d’un usage courant jusqu’aux années 1940, elles existent dans tous les studios des portraitistes. Chaque studio en possède souvent plusieurs : paysages bucoliques, escaliers de château, terrasse fleurie, intérieur bourgeois, bords de mer… composent souvent le décor devant lequel viennent poser les portraiturés.

Le musée de Bretagne en conserve trois provenant du studio d’Anne Catherine à Redon, réalisés autour de 1900. Ils sont d’ordinaire monochromes, celui-ci en couleur atteste du passage de la photographie noir et blanc à la couleur, il est plus sobre que ses prédécesseurs mais néanmoins signé. Les peintres décorateurs de théâtre sont parfois les auteurs de ces toiles peintes, leur réalisation est aussi selon le lieu et le milieu, confiée à des amateurs locaux dont le sens de la perspective laisse parfois à désirer.

Malgré le fait que ces toiles aient été abondantes, très peu sont conservées aujourd’hui : roulées en studio, déplacées en voiture ou sur un vélo d’un lieu à l’autre elles ont souvent souffert de manipulations excessives et sont peu à peu tombées en désuétude.

 Éléments essentiels de là photographie de studio et du geste du photographe, elles témoignent  d’une volonté de soigner le décor en mettant en valeur ceux qui posent devant un paysage illusionniste et rêvé.

Laurence Prod’homme.

Décembre 2021.

Laisser un commentaire