Au 19e siècle, les associations et sociétés de sauveteurs en mer fleurissent sur le territoire national. On en compte près de 150 avec une concentration importante dans les régions maritimes. Ainsi, il n’est pas étonnant de retrouver plusieurs de ces associations en Bretagne, et notamment celle des Hospitaliers sauveteurs bretons.
La société des Hospitaliers sauveteurs bretons est créée à Rennes en 1873 à l’initiative du magistrat Henri Nadault de Buffon, apparenté au célèbre botaniste. Elle est inaugurée le 17 mai 1874 et reconnue comme établissement d’utilité publique en 1895. D’après son bulletin mensuel, édité à partir de 1875, la société se nomme la Société régionale libre des hospitaliers sauveteurs bretons. Ainsi, bien qu’elle soit basée à Rennes, elle œuvre sur l’ensemble des cinq départements historiques de la Bretagne : Finistère, Morbihan, Côtes-d’Armor, Ille-et-Vilaine et Loire-Atlantique. Puis, au cours du 20e siècle, la société connaît même une extension de ses activités sur les côtes françaises, du Havre jusqu’à Bordeaux, tandis que les sauveteurs en mer se professionnalisent et se spécialisent en France.
Les sauveteurs en mer sont communément perçus comme des figures du dévouement, du courage et de l’altruisme (CAILLE Frédéric, « Des médailles contre la violence ? Le sauveteur maritime, les Hospitaliers-Suaveteurs Bretons et l’imaginaire civique du dévouement courageux au XIXe siècle« , in : AUGERON et TRANCHANT, La violence et la mer dans l’espace atlantique (XIIe – XIXe siècle), Presses universitaires de Rennes, 2004, p.1). Ces valeurs morales reconnues et médiatisées sont affirmées par les sociétés de sauveteurs en mer. Ainsi, le fondateur des Hospitaliers sauveteurs bretons déclare dans les Statuts de la société : « cette œuvre est à la fois une institution de sauvetage et de sauveteurs et une société de bienfaisance, de moralisation et d’encouragement au bien ». Cette notion de bien est au cœur des valeurs portées par la société et est mise en avant dans l’intitulé même de son bulletin Les Annales du Bien.

Les activités des Hospitaliers sauveteurs bretons sont très diverses. Plusieurs congrès portant sur les thèmes du sauvetage, de l’hygiène, de la sécurité maritime, de la pêche sont organisés dans la première moitié du XXe siècle. Les sauveteurs dispensent et bénéficient de formations aux premiers secours. Des prix et médailles sont décernés annuellement au plus méritants.

Les membres de la société organisent également des loteries et des fêtes de bienfaisance dans le but de récolter des fonds, mais aussi d’exhorter à la vertu, au courage et au dévouement.
Toutefois, leurs activités les plus essentielles consistent dans la mise en place de maisons et de refuges pour les naufragés, de postes de secours et surtout des dizaines de stations de sauvetage sur les principaux points du littoral breton. Les stations de sauvetage sont immédiatement reconnaissables étant dotées d’un pavillon mi-parti de blanc et de bleu, chargée d’une hermine de sable. Après la Seconde Guerre mondiale, qui a entraîné la destruction et le pillage de la quasi-totalité des stations, de nombreux postes sont reconstruits et réapprovisionnés. À ce titre, la société, dont les moyens sont modestes, bénéficie notamment de subventions de la part des différents conseils départementaux bretons.
Chaque station et poste de secours est pourvu de matériels spécifiques. Au premier lieu des équipements, il y a des embarcations de secours qui, au fur et à mesure du développement de la société, sont devenues plus solides et performantes, tandis que les équipages ont été mieux entrainés à leur manipulation. Il faut d’ailleurs que les sauveteurs soient identifiables et disposent d’équipements de protection de base. Ainsi, le Musée de Bretagne conserve deux brassards qui permettent aussi l’identification des sauveteurs.

De plus, les sauveteurs ont également à leur disposition un ensemble de matériel de soins médicaux de premier secours. Le matériel le plus utile est conditionné dans des mallettes qui parfois ont été créées directement par la société des Hospitaliers Sauveteurs Bretons. C’est le cas de cette mallette de 1947.

Elle a fait l’objet en 2021 d’un don au Musée de Bretagne, accompagnée de deux autres mallettes. L’ensemble appartient à Claude Petit, membre actif des Hospitaliers sauveteurs bretons dans les années 1950 et 1960. Ayant été reconnu moniteur national de secourisme spécialisé dans la prise en charge des accidentés et des asphyxiés, il est intervenu à plusieurs reprises pour dispenser les premiers soins aux blessés et former d’autres sauveteurs.

Les mallettes contiennent des objets très divers : on y trouve des pansements, des bandes, des écharpes, des compresses, des garrots, des seringues, des médicaments, une blouse médicale ainsi que des produits liquides désinfectants. Certains objets peuvent être d’usage obscur pour les néophytes. Ainsi, une notice a été accolée à la mallette de sauveteur pour privilégier une information en situation d’urgence.

Celle-ci porte sur les premiers secours à apporter aux blessés, aux noyés ou aux asphyxiés. Par son biais, on peut identifier, par exemple, l’usage d’une pince dénommée « pince tire-langue » : « La pince tire-langue sert à pratiquer les mouvements de la langue pour la respiration artificielle, 15 à 18 fois par minute au rythme de la respiration de l’opérateur ».
Cet ensemble vient enrichir de manière significative les collections du Musée de Bretagne sur l’histoire sociale, médicale et maritime de la région. Le musée ne conserve pas d’autres mallettes de premiers secours dans ses collections et celles-ci sont particulièrement bien documentées grâce aux renseignements fournis par les donateurs. De plus, cette donation permet de conserver l’histoire et l’identité d’une importante société régionale du 20e siècle. En effet, en 1967, les Hospitaliers sauveteurs bretons fusionnent avec la Société centrale de sauvetage des naufragés, qui devient par la suite la Société nationale de sauvetage en mer, célèbre SNSM.
Julie Garnier.
Juillet 2022.